Publié le 21 Juillet 2019

Couverture du premier livre, avec dessin de l'auteur.

Couverture du premier livre, avec dessin de l'auteur.

Publier dans la presse indépendante des textes brefs, de manière continue et régulière est, bien entendu, très utile. Les réunir dans un recueil est encore mieux. La somme permet, d’une part, de vérifier si une logique, et laquelle, a présidé à la rédaction des textes, et, d’autre part, d’avoir une vue d’ensemble du ou des phénomènes sociaux examinés.

Voici proposés deux recueils complémentaires l’un à l’autre, respectivement intitulés « Vers l’intifadha populaire en Algérie 2019 » et « Sur l’intifadha populaire en Algérie 2019 ».

Vers le soulèvement populaire

Le premier volume expose diverses causes et différentes formes de domination sociale oligarchique, d’un coté, et, de l’autre, des formes d’action de résistance populaire. Cette domination et cette résistance ont eu lieu dans tous les domaines de la vie sociale, de haut (institution étatique) en bas (citoyen le plus ordinaire), en passant par les intermédiaires entre les deux.

Contrairement à celles et ceux qui ont désespéré du peuple, même en tant qu’opposants politiques du régime, par élitisme arrogant et méprisant de personnes jouissant de statut social privilégié, d’autres, dont l’auteur de « Vers l’intifadha populaire... », n’ont jamais dénié au peuple ses capacités de résistance et de résilience. Sans occulter les carences du peuple, on garde l’estime de celui-ci, même quand il est victime du pire des conditionnements idéologiques. Cette estime n’est pas causée par une illusion béate et utopique sur les capacités du peuple, quel qu’il soit, mais par ce que un Maître, appelé l’histoire sociale, enseigne : la société humaine a, partout et toujours, y compris l’Algérie, parmi ses lois celle-ci : tant qu’une oligarchie parvient à dominer, et ses victimes consentent à subir, la communauté sociale (le prétendu « ordre social », en réalité un désordre entretenu) perdure et peut même empirer. Toutefois...

Sur le soulèvement populaire

Toutefois, arrive un moment où les dominés, trop exploités et trop humiliés, ne réussissent plus à se résigner à leur condition, d’une part, et, d’autre part, les dominateurs, trop certains d’eux-mêmes, trop arrogants et trop avides de richesses suite à l’exploitation du peuple et des ressources naturelles de la nation, ne disposent plus de moyens pour maintenir leur pathogène et criminelle oppression. Surgit, alors, le soulèvement populaire, exigeant l’élimination radicale du système social dominateur, et l’établissement d’un nouveau système social, plus conforme à la dignité humaine. Ce phénomène social de contestation radicale ne surprend que les ignorants en matière d’histoire sociale, parce que manquant de connaissance suffisante ou parce que aveuglés par leurs privilèges de caste, même si cette dernière se proclame « démocratique », « libérale » ou encore « révolutionnaire ». C’est ce qu’examine le second volume.

Il demeure néanmoins un travail incomplet, à continuer, un « work in progress », car l’intifadha populaire est en cours. Elle manifeste des forces et des faiblesses, et personne, aucun « expert », aucun politicien, pas même les protagonistes du soulèvement, n’est capable d’entrevoir où se dirige le processus.

Cependant, l’histoire sociale des peuples, en général, et celle du peuple algérien, en particulier, permettent d’avancer des hypothèses et des pistes de recherche et d’action, basées sur la connaissance des expériences passées, nationales et mondiales, de ce genre de soulèvement populaire. Néanmoins, partout et toujours, le peuple reste souverain dans sa démarche, tout au moins jusqu’à une certaine phase du processus. À ce sujet, Maître Histoire sociale enseigne encore ceci : tout est possible, le pire et le meilleur. L’issue dépend du degré d’intelligence stratégique des protagonistes adversaires ; le peuple, d’une part, et, d’autre part, ceux qui le gouvernent. Cette intelligence stratégique se manifeste dans le niveau d’organisation autonome, produisant une direction incarnée par des représentants adéquats, d’une part, et, d’autre part, par la connaissance la plus précise des forces et faiblesses que chaque protagoniste a de lui-même et de son adversaire. Pas aisé, comme on le devine.

Principes conducteurs

Les idées exposées dans les deux ouvrages en question se développent sur la base de deux principes fondamentaux, exposés de manière claire, - tout au moins il faut l’espérer -, également répétitive, parce que ces principes sont très généralement ignorés, sinon occultés.

Le premier principe est le triptyque liberté, égalité et solidarité. Ces trois concepts, ces droits citoyens sont indissociables parce qu’ils forment une unité complémentaire, où les éléments dépendent l’un de l’autre. En absence de cette unité complémentaire, la liberté n’est que celle du plus fort-rusé-égoïste au détriment des autres, l’égalité n’est que celle entre les dominateurs (bien que parmi eux une lutte existe entre castes ou, si l’on veut, entre clans) face aux dominés, et la solidarité n’est que celle des dominateurs, tant qu’ils sont obligés de se confronter avec les opprimés pour maintenir leur domination sur eux. En effet, les oppresseurs interdisent aux oppressés, d’une manière ou d’une autre, le droit à liberté (parce qu’elle est susceptible de contester la domination oligarchique), le droit à l’égalité (formellement reconnue et proclamée, elle est niée dans les faits), et le droit à la solidarité (l’oligarchie veille à diviser le peuple pour le dominer).

Le second principe conducteur des textes de ces deux essais est le suivant : un peuple ne peut se sauver que par lui-même. Cela est possible, répétons-le, à travers sa capacité auto-organisatrice et représentative.

Tout au plus, une minorité de privilégiés, parce que dotés néanmoins d’une éthique citoyenne correcte (autrement dit, concevant liberté, égalité et solidarité comme unité complémentaire indissociable), cette minorité peut contribuer à l’affranchissement de ce peuple de toute forme d’assujettissement, à condition de ne pas s’ériger en nouvelle oligarchie dominatrice, quelque soit l’étiquette, plus exactement le masque, servant à légitimer cette forme inédite de domination.

Jusqu’à présent, partout dans le monde, dans le passé, un peuple a tout au plus réussi à s’auto-gouverner pendant un bref laps de temps (au maximum trois ans), puis il fut vaincu par une nouvelle oligarchie. Les exemples sont mentionnés dans le premier volume. Ces brèves expériences demeurent néanmoins très précieuses. Elles sont des « exercices » constituant des leçons pour mieux agir dans le futur.

Concernant le problème stratégique de la capacité auto-organisatrice et représentative du peuple, c’est précisément le problème stratégique auquel est confronté, en cette phase où ces lignes sont écrites, l’intifadha populaire en Algérie.

Étant donné que le pays dispose d’une effarante et désolante minorité de librairies, et que parmi les candidats lecteurs certains ne disposent pas du prix marchand d’un livre, surtout volumineux, les deux essais considérés ici sont gratuitement disponibles en format PDF par les Éditions Électrons Libres.

 

Pour télé-décharger :

« Vers l’intifadha populaire en Algérie 2019 » in https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-vers-intifadha-algerie-2019.html

« Sur l’intifadha populaire en Algérie 2019 » in https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-sur-intifadha-algerie-2019.html

 

Publié sur La Tribune Diplomatique Internationale, le 08 juillet 2019, Algérie Patriotique, le 20 juillet 2019, Le Matin d'Algérie, le 21 juillet 2019.

 

 

 

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Rédigé par Kadour Naimi

Publié dans #PEUPLE-DEMOCRATIE

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Publié le 13 Juillet 2019

Manifestation populaire à Alger, printemps 2019.

Manifestation populaire à Alger, printemps 2019.

« Ceux qui tuent, viendra le jour où ils s’entre-tueront.

Partout et toujours,

l'histoire a donné la leçon.

Celui qui vainc sans armes et sans tuer,

montre ainsi la puissance de sa raison et de ses pensées. »

 

« Al hanana, ya ouled ! » (La tendresse, les enfants !)

En 2012, lors de mon retour au pays, après une quarantaine d’années d’exil volontaire, le « commissaire » (quelle appellation !) du Festival International de Théâtre de Bejaïa me « permit » de réaliser une pièce de théâtre à présenter lors de cet événement. Son thème fondamental était la non-violence, inspirée de l’action et de la théorie de Gandhi, comme stratégie défensive victorieuse. La citation en exergue ci-dessus vient de la pièce

La plupart des « bien-pensants » d’Algérie m’objectèrent que cette idée de non-violence ne pouvait être que d’un Algérien totalement déconnecté des « réalités » de l’Algérie, parce que vivant depuis trop longtemps à l’étranger ; certains osèrent jusqu’à parler de « mièvrerie » et d’une personne qui vit dans la planète Mars.

Enfin, pour enterrer l’idée de résistance pacifique comme stratégie, les plus malhonnêtes déclarèrent, contre toute évidence du contenu de la pièce, que l’œuvre que je présentais était un éloge de la … « réconciliation nationale » de l’ex-président Bouteflika. Ce fut le motif pour que le « commissaire » du Festival, nommé par l’oligarchie bouteflikiste, après une unique représentation, a interdit définitivement d’autres représentations de l’œuvre (1). Quant à l’argent employé pour la réalisation de la pièce, le « commissaire » ne s’en désola même pas, puisque « ‘Ammi Messaoud » (Oncle Messaoud), autrement dit les puits de pétrole de Sidi Messaoud permettaient tous les gaspillages. C’est dire combien large, profonde et nocive est la « issaba » (bande de mafieux) dominant le pays des chouhadas.

Et voilà que sept années après, en 2019, le peuple choisit, contre toute attente des mêmes « bien pensants », la stratégie gandhienne de non violence pour exprimer publiquement ses revendications sociales. Le groupe de personnages incarné dans la pièce, hommes et femmes, appelés « hmamâ» (colombes, en référence au symbole de la paix) devint des millions d’Algériens et d’Algériennes, manifestant pacifiquement et joyeusement dans les rues d’Algérie. À la hogra dont je fus victime de la part du « commissaire » du Festival, et de ses compères dans une certaine presse, le peuple m’a libéré. Et je l’en remercie de tout cœur !

 

Pouvoir de l’intelligence

Certains voient dans l’emploi de la méthode pacifiste gandhienne une inspiration néo-impérialiste manipulant le peuple par l’intermédiaire de harkis indigènes. En effet, des motifs sérieux constituent des preuves irréfutables de cette visée manipulatrice.

Néanmoins, cette tactique pacifique peut être une arme efficace au service du peuple, à condition qu’il sache comment l’employer à son bénéfice. Martin Luther King l’employa avec succès, même s’il fut assassiné (d’ailleurs, Gandhi le fut également), pour la conquête sociale des droits civiques aux États-Unis (2).

Quant à l’intifadha populaire actuelle en Algérie, ses résultats si pas encore totalement concluants, ils ne sont toutefois pas négligeables. Certes, vues les difficultés rencontrées, - notamment l’incapacité d’auto-organisation et d’élection de représentants adéquats (3) -, des doutes persistent, un certain pessimisme est compréhensible quant au succès final de l’intifadha populaire algérienne. Il reste à ses activistes de trouver comment poursuivre efficacement l’action pour l’obtention de leurs buts légitimes : liberté, égalité et solidarité collectives. Uniquement ainsi, à l’Algérie et à son peuple sera redonnée la dignité exemplaire que lui avaient conférée ses chouhadas, et dont veulent, depuis lors, se venger les oligarchies vaincues, avec l’habituelle complicité de leurs harkis locaux, constituant la fameuse « issaba

Devant des adversaires capables de recourir à la violence physique, sous prétexte de violences de la part des manifestants, et sachant que ce genre de violence, d’où qu’elle vienne, est absolument néfaste tant pour le peuple que pour la nation algérienne, ce même peuple contestataire a su jusqu’ici maintenir le principe pacifique dans la revendication de ses légitimes droits bafoués par un régime mafieux, répétons-le. Et ce pacifisme est maintenu, malgré les tentatives, de la part du régime contesté, de manipuler de diverses manières la situation à son profit. Pour l’intifadha populaire, quelques soient par ailleurs ses carences, le maintien jusqu’ici de la pratique pacifiste est la démonstration d’une intelligence aiguë en matière d’action sociale.

 

Force et faiblesse

Partout dans le monde, les diverses expériences de rupture sociale radicale, au bénéfice du peuple, ont démontré ceci : le recours à la violence, de la part du peuple, pour éliminer une oligarchie trop prédatrice, n’a conduit jusqu’à présent à rien d’autre qu’à l’instauration d’une oligarchie de forme nouvelle. Elle parvient à récupérer l’action contestataire radicale du peuple, et s’empare du pouvoir, d’une manière ou d’une autre. Cette caste victorieuse prend soit la forme d’une « démocratie », en réalité capitaliste (donc exploiteuse), soit la forme d’une « démocratie populaire », en réalité capitaliste étatique (exploiteuse d’une autre manière, qui peut être même pire, voir les soit disant « camp de travail », l’interdiction de syndicats autonomes ou de s’expatrier, une police politique interdisant au peuple tout forme de contestation, même pacifique, etc. (4)

C’est que ce genre de rupture sociale, - élitiste, hiérarchique et autoritaire -, s’opère par le recours à la violence. Or, ce mème recours à la violence, qui a servi à éliminer un système social honni, continue à servir pour créer et maintenir la nouvelle oligarchie dominante. La citation en exergue l’affirme.

Toutefois, il est vrai que la stratégie pacifiste, elle aussi, peut aboutir au même résultat non désiré par le peuple, à savoir la naissance d’une nouvelle oligarchie dominatrice. Le cas exemplaire est celui de l’Inde. Une fois obtenue l’indépendance par l’action pacifique gandhienne, le pays a vu s’établir une oligarchie inédite autochtone, dominatrice-exploiteuse, où les castes sociales perdurent, sans parler de l’obtention de la bombe nucléaire.

Ceci étant exposé, voici les avantages de la stratégie pacifiste, en constatant les résultats des diverses expériences historiques mondiales.

D’abord, contrairement à ce qu’affirment certains, il faut beaucoup plus de courage et d’intelligence pour affronter un adversaire de manière pacifique que de manière violente. Ensuite, la pratique pacifiste écarte, tout au moins par principe, toute velléité d’élitisme et d’autoritarisme hiérarchique totalitaire. Enfin, la pratique pacifiste opère sur les consciences citoyennes de la manière la plus large, la plus profonde, à long terme (5). C’est ainsi que les peuples, partout dans le monde, furent conscientisés et préparés aux actions de rupture sociale. Dans ces cas-là, le temps se compte en décennies. Ce n’est pas un motif individuel pour renoncer à l’éthique citoyenne d’ajouter sa propre contribution, selon les possibilités disponibles, y compris dans l’incertitude de voir se réaliser l’idéal espéré.

Cependant, hélas !, les « Grands Soirs » de révolution violente n’ont jamais concrétisé leurs belles promesses. Au contraire, le travail de « taupe » patiente du pacifisme a permis de concrétiser sinon tous ses objectifs, tout au moins certains, par exemple les droits de vote pour les femmes dans certaines nations « démocratiques » cependant machistes (les « suffragettes » en Angleterre), l’indépendance de l’Inde, les droits civiques dans les nations « démocratiques » cependant racistes (États-Unis). Aujourd’hui, par exemple, l’État colonialiste d’Israël craint moins l’action armée du peuple palestinien que son action pacifique de boycott des productions réalisés illégalement sur la partie du territoire de Palestine revenant de droit, reconnu par les Nations Unis, au peuple palestinien. Rappelons, également, dans le passé, l’impact très important qu’eut le boycott économique pour l’élimination de l’apartheid en Afrique du Sud.

La méthode pacifiste en est venue à être considérée par les agences des oligarchies impérialistes, néo-colonialistes et colonialiste sioniste comme un instrument fondamental de manipulation des peuples dominés-exploités, pour le changement de régimes politiques, mais au profit de ces mêmes oligarchies impérialistes, néo-colonialistes et colonialiste sioniste. C’est dire l’importance de cette stratégie, puisque les ennemis des peuples, eux-mêmes, y recourent. Dès lors, comme déjà dit auparavant, cette méthode d’action pacifique, même dans le cas de violence manifestée par l’adversaire dominateur, devrait se maintenir coûte que coûte (rappelons-nous les massacres des colonialistes anglais en Inde, durant la revendication d’indépendance), car la stratégie pacifiste peut se révéler victorieuse au bénéfice des peuples. Tout le problème est d’éviter les tentatives oligarchiques de diviser pour dominer le peuple, que celui-ci donc doit maintenir son union solidaire. Cela ne veut pas dire qu’en son sein des contradictions n’existent pas, mais qu’il lui faut leur trouver des solutions de manière démocratique, selon la loi de la majorité, quand l’unanimité se révèle impossible.

 

Encore de l’intelligence !

Reste au peuple d’empêcher la naissance d’une oligarchie nouvelle, pour réussir à construire le système social au bénéfice du peuple tout entier. Tout est là : vaincre par l’action pacifique et, par elle encore, établir la démocratie dans sa forme la meilleure (d’autres disent la moins mauvaise), à savoir celle où réellement nous avons affaire à « houkm a chaab » (6) (le pouvoir du peuple), par et pour le peuple. Cela signifie, - répétons-le tant qu’il sera nécessaire - : liberté, égalité et solidarité collectives, seule manière d’éliminer toute forme d’exploitation de l’être humain par son semblable, sans oublier l’exploitation criminelle des ressources naturelles de la planète.

Utopie ?… Elle ne l’est que tant qu’elle ne sera pas réalisée. Comme l’utopie qui élimina l’esclavagisme, puis le féodalisme. Pourquoi donc le capitalisme, privé ou étatique, serait-il éternel ? Quant à croire le « moins mauvais » le système « libéral », n’est-il pas oligarchique ? Le « moins mauvais » son système économique capitaliste, n’est-il pas monopoliste, fauteur de guerres pour la conquête des marchés mondiaux et destructeur des ressources naturelles de la planète ? Le « moins mauvais » son système démocratique, n’est-il pas oligarchique ? La « moins mauvaise » sa civilisation, ne produit-elle pas les ravages écologiques et le conditionnement idéologique transformant les êtres humains, individus et peuples, en ennemis engagés dans un féroce et impitoyable « struggle for life », en robots travaillant uniquement pour le profit de la caste oligarchique, en âmes mortes dévoreuses d’anxiolytiques, au profit des multinationales de médicaments, en mercenaires en uniforme d’armées d’agressions au profit des usines d’armement, en des animaux dont le comportement est inférieur à celui des bêtes sauvages, réduisant la planète à un asile de dérangés mentaux, dirigés par des psychopathes diplômés, cravatés, au sourire aussi grimaçant qu’hypocrite, où tout est publicitaire, donc mensonger et manipulateur, dans le seul but d’enrichir une minorité d’obsédés de compte en banque, pour lesquels « après moi, le déluge ! » ?

Dès lors, pourquoi ne pas essayer, de manière pacifique, avec la patience et l’intelligence nécessaires, l’instauration d’une démocratie de type populaire, laquelle est autogestionnaire, c’est-à-dire auto-gouvernée par des institutions reflétant réellement la volonté populaire la meilleure ? Et que veut tout peuple, enfin conscient, débarrassé de tout conditionnement oligarchique, sinon la liberté, l’égalité et la solidarité pour toutes et tous sans exclusion aucune, au sein et entre les nations de cette planète ?

___

(1) Détails sur l’affaire in « Éthique et esthétique au théâtre et alentours », LIVRE 4 : « Retour en zone de tempêtes », librement disponibe https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-theatre-oeuvres-ecrits%20sur%20theatre_ethique_esthetique_theatre_alentours.html La pièce est visible ici : https://www.youtube.com/watch?v=YhW3_B6UDto

(2) Voir « Des adversaires du mouvement populaire et comment les neutraliser » in « Vers l’intifadha populaire en Algérie 2019 », librement disponible ici : https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-vers-intifadha-algerie-2019.html

(3) Voir « Des représentants du mouvement populaire : 1. Sont-ils inutiles ? 2. Sont-ils nécessaires ? » in « Vers l’intifadha... », o. c.

(4) Voir « Démocratie, mais laquelle ? » in « Sur l’intifadha populaire en Algérie 2019 », librement disponible ici : https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-sur-intifadha-algerie-2019.html

(5) Voir « La guerre, pourquoi ? La paix, comment ?... », chapitre « Pacifisme », librement disponible ici : https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-guerre-paix.html

(6) Que penser des linguistes arabes qui ont la fainéantise intellectuelle de traduire « démocratie » par cet affreux mot « dimocratiya », au lieu d’agir comme les linguistes chinois ? Ces derniers, au lieu de s’abaisser à être de piètres suivistes néo-colonisés, disent « mín zŭ », textuellement « peuple maître », ou, traduit de manière plus libre mais fidèle : gouvernement (administration, gestion) [du, par] le peuple. Sur le problème linguistique, voir « DEFENSE DES LANGUES POPULAIRES : Le cas algérien », librement disponible ici : https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-defense_langues_populaires.html

 

Publié sur Algérie Patriotique, le 03 juillet 2019, La Tribune Diplomatique Internationale, le  03 juillet 2019 , Le Matin d'Algérie, le 10 juilllet 2019.

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Rédigé par Kadour Naimi

Publié dans #PEUPLE-DEMOCRATIE

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Publié le 12 Juillet 2019

Dé-caporaliser l’université algérienne

Lors de la journée nationale de l’étudiant, rappelant le 19 mai 1956, furent recueillis des témoignages, le premier d’enseignants (1), le second d’un étudiant (2). Bien qu’il s’agisse de protagonistes uniquement d’un département d’une université particulière d’Oran, ces témoignages reflètent la situation de l’université algérienne dans son ensemble.

Comme le reste des institutions en Algérie, l’université fut dès le départ, après l’indépendance, systématiquement caporalisée. Ce fut d’abord au nom du prétendu « socialisme », ensuite de la soit disant arabisation, enfin de … n’importe quoi, pourvu que la situation profite à la minorité oligarchique dominante.

Toutes ces phases sont caractérisées par un fil noir : fabriquer des cadres administratifs-caporaux d’une immense caserne appelée université, où les enseignants sont contraints d’assumer le rôle de dresseurs d’étudiants réduits à des perroquets. L’argent sert aux bureaucrates et aux mandarins comme carotte pour leur faire jouer l’infamant rôle de courroie de transmission de la volonté de l’oligarchie. Oui, l’argent corrupteur maudit a étouffé le noble esprit générateur de culture. Et tout cela en se proclamant « vrai musulman », de la « famille révolutionnaire », « patriote » exemplaire. Imposture totale ! Mais profitable à l’oligarchie et à ses harkis (3).

Le résultat actuel est constaté par toutes les personnes honnêtes et objectives qui s’activent dans l’université : servilisme bureaucratique, donc médiocrité affligeante dans tous les domaines. Toute personne compétente et honnête est neutralisée, sinon écartée, quand pas obligée à démissionner, autrement carrément assassinée dans des conditions « mystérieuses ».

Le curieux de ce constat est ce fait : du temps de la dictature militaire déclarée, une certaine résistance d’enseignants et d’étudiants parvenait, au prix d’une répression implacable, à sauver un peu l’université de sa réduction à un instrument de production et de reproduction de la servitude volontaire, et de sa conséquence, l’abêtissement de toute forme de connaissance susceptible de développement économique, social et culturel.

Mais, depuis la « libéralisation » économique du pays, l’argent de la rente a acheté presque toutes les consciences au bénéfice de l’oligarchie.

Bien entendu, entre-temps, les enfants de cette dernière, eux, bénéficient d’études dans des universités occidentales renommées, jouissant par la suite des privilèges qui en découlent. L’Algérie était, - et demeure encore -, la proie d’une bande de mafieux (« issâba »). Je me rappelle un échange avec un ami italien. Je lui reprochais le fait que l’État italien était corrompu par les infiltrations de la mafia. Il me répondit, en souriant : « Oui, c’est vrai, l’État italien est influencé par les membres de la mafia. Mais, chez vous, en Algérie, la mafia est au pouvoir ! »

Dès lors, les témoignages proposés en complément audio et video de cette brève contribution fournissent, en ce qui concerne les enseignants, les preuves concrètes de cette caporalisation programmée de l’université algérienne. Il faut être ignorant de la situation ou volontairement la nier, parce que bénéficiant de privilèges de caste, pour occulter cette volonté délibérée de réduction de l’université à une honteuse fabrique d’esprits bornés. Elle est néanmoins profitable à l’oligarchie mafieuse dont le seul but est de s’enrichir le plus vite, au maximum et par tous les moyens, au prix d’entraîner l’Algérie dans la pire des situations.

Parmi les enseignants compétents et honnêtes, beaucoup quittent avec amertume le pays pour des nations où leurs connaissances sont reconnues et bien rémunérées. Seule une minorité, soucieuse de sa dignité citoyenne au sein du peuple où elle est née, préfère rester et lutter, affrontant tous les risques, contre cette déchéance criminelle.

Quant au témoignage de l’étudiant, il expose les motifs de la révolte estudiantine en vue de redonner à l’institution universitaire le digne et indispensable rôle qu’elle doit avoir dans une nation méritant ce nom.

Laissons la conclusion à l’enseignante : « Mais ce soulèvement [l’intifadha populaire actuelle] nous a donné de l’espoir. (…) Il faut élire des gens pour nous représenter, il faut qu’on commence à réfléchir, à nous donner à faire, pour le bien de ce pays, de ce peuple ! »

Pour y parvenir, quelle est la solution la plus raisonnable et la plus juste ?… Ne consiste-t-elle pas à recourir à l’élection des représentants, aussi bien des gestionnaires administratifs, des enseignants que des étudiants : 1) sur base de la compétence technique doublée de l’éthique citoyenne, 2) de manière démocratique avec mandat impératif, c’est-à-dire avec révocabilité à tout moment en cas de manquement au mandat assumé ? N’est-ce pas cela l’indépendance de l’institution universitaire, selon le principe « par le peuple et pour le peuple » ?… il reste à l’intifadha populaire actuelle à concrétiser ce but ; il redonnera au peuple et à l’Algérie la dignité pour laquelle ses chouhadas ont consenti le sacrifice qui fut le leur.

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(1) Voir video in https://www.youtube.com/watch?v=GfvPgKeuSM8&feature=youtu.be

(2) Voir video in https://www.youtube.com/watch?v=XpoTSJ2YrSk&feature=youtu.be

(3) Dans le domaine politique et économique, un seul eut la courageuse honnêteté de reconnaître qu’il fut un « harki » du système oligarchique : Sid Ahmed Ghozali, ex-patron de la Sonatrach, puis ex-ministre.

 

Publie le 25 juin 2019 sur Algérie Patriotique, Le Matin d'Algérie, le 25 juin 2019, La Tribune Diplomatique Internationale.

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Rédigé par Kadour Naimi

Publié dans #PEUPLE-DEMOCRATIE

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Publié le 11 Juillet 2019

Démocratie, mais laquelle ?

S’il y a un mot qui fut, demeure et sera le plus utilisé, c’est bien celui de « démocratie ». Oh ! Merci à ceux qui ont l’affront de la dénoncer publiquement comme nuisible : tous les autoritaires totalitaires, laïcs ou cléricaux du monde. Au moins, avec ces gens-là, la situation est totalement claire. Ce sont des ennemis déclarés de toute forme de démocratie.

Il reste les prétendus « amis », « partisans » et « défenseurs » de ce qu’ils appellent la démocratie.

Dans ce texte, contentons-nous d’une présentation essentielle, espérons non superficielle. L’important est de fournir quelques éclaircissements offrant des pistes de réflexion.

Invention.

Commençons par les inventeurs du mot, les Grecs antiques. D’abord, il faut leur reconnaître le mérite d’avoir créé cette idée, ce concept. Ensuite, il faut ne pas être dupe. Ce sont les membres de l’oligarchie dominante athénienne qui ont vanté et défendu cette démocratie. En fait, elle existait uniquement entre les membres de cette oligarchie, détentrice du pouvoir étatique, économique et idéologique dans la cité. Le peuple, les femmes et les esclaves, autrement dit la grande majorité de la population, en étaient totalement exclus. Ce fut cela la démocratie athénienne. Et elle fut impérialiste envers les autres cités et territoires de la Grèce, et mème au-delà, notamment en Italie du sud.

Démocraties oligarchiques : premières adaptations.

Dans la Rome antique, les luttes citoyennes du peuple réalisèrent un progrès. Dans la République romaine, elle aussi impérialiste, l’oligarchie, constituée par les patriciens (les membres du Sénat, l’empereur) furent obligés de reconnaître des droits au peuple travailleur qui parvint à élire ses représentants, les plébéiens.

Bien que les patriciens s’efforcèrent de maintenir le pouvoir entre leurs mains, en excluant totalement les représentants de la « plèbe », ces derniers parvenaient néanmoins à infléchir le degré d'exploitation-domination exercé par l’oligarchie sur le peuple. Ce progrès nécessita des guerres civiles sanglantes où le peuple laborieux (les plébéiens) furent obligés de payer le prix le plus coûteux.

Vint ensuite l’obscure période féodale, où le mot même de démocratie s’évanouit. Quand cette époque funeste entra dans des contradictions insolubles, les communes commencèrent à se former puis à revendiquer leurs droits. Ce fut la naissance de la bourgeoisie marchande et financière.

Avec le développement de ses activités économiques, elle comprit qu’il lui fallait éliminer la caste féodale, devenue parasitaire. C’est alors que progressivement le mot démocratie revint à l’ordre du jour. Cet idéal convenait à la bourgeoisie. Il impliquait la liberté… du commerce, d’investir et de réaliser des profits (au détriment des autres), jusqu’à parvenir au fameux slogan du ministre Guizot « Enrichissez-vous ! », bien entendu sans dire par quel moyen, car on le savait au détriment des victimes de cet enrichissement d’une minorité privilégiée. Dans cette perspective, la religion fut, évidemment, embrigadée, notamment sous sa forme protestante, au prix de guerres civiles monstrueuses. « Tuez-les tous et Dieu reconnaîtra les siens ! » fut le slogan favori.

Mais la caste féodale résistait, tenait à son parasitisme, cherchant à exploiter à son profit la bourgeoisie naissante, plus riche. Les contradictions devinrent telles que la bourgeoise fut obligée de recourir à la révolution armée, d’abord en Angleterre (Cromwell), puis en France (1789).

Les révolutionnaires français mirent en avant le slogan « Liberté, Égalité, Fraternité ». Mais très vite, environ trois années après, des éléments de la bourgeoisie, dont Robespierre était le représentant le plus en vue, transformèrent la liberté en celle du… commerce, au détriment des libertés politiques, éliminées à coups de guillotine contre ceux qui défendaient une liberté en faveur du peuple travailleur (Hébertistes, babouvistes, « Enragés », « Sans culottes »). L’égalité, elle, fut enterrée, ainsi que la fraternité, manière familière à l’époque, peut-être un reste de féodalisme, pour désigner la solidarité. Et, pour se légitimer, Robespierre et sa clique inventèrent une nouvelle religion, celle de l’ « Être Suprême », pour aliéner le peuple à leur pouvoir oligarchique.

Quant à la république qui vit le jour aux États-Unis, dans la Constitution le mot « démocratie » n’y figurait pas ! Et les droits du citoyen proclamés ne comprenaient pas les esclaves. Le pays nouvellement colonisé, au prix des génocides de populations autochtones que l’on sait, fut la proie d’une oligarchie de type nouveau. Mais, au fond, elle fonctionnait comme celles antiques grecque puis romaine.

Adaptations modernes.

Ainsi, la classe bourgeoisie, à travers ses représentants politiques (également économiques et idéologiques), parvint à dominer entièrement le pouvoir étatique, renforçant en retour son pouvoir économique et son emprise idéologique. Le système capitaliste était né. On l’orna du substantif « libéral », en référence, évidemment, à la « sainte » liberté, celle d’exploiter les plus faibles, à savoir la majorité du peuple.

On prit le soin de légitimer ce système également par la religion. La Bible affirme la volonté divine de créer des riches (autrement dit les exploiteurs) et des pauvres (les exploités). Les Évangiles accomplirent un progrès. Ils fustigeaient les riches (exploiteurs) et honoraient les pauvres (exploités) en déclarant que les premiers n’entreront pas plus au Paradis qu’un chameau au travers de l’ouverture d’une aiguille, tandis que les seconds bénéficieront pleinement du Paradis. Ainsi, les castes cléricales juive et chrétienne ont pu jouir de privilèges, en échange de la légitimation qu’elles accordaient à l’oligarchie.

Ce système capitaliste entraîna ce que sa nature même devait entraîner : l’expansion coloniale, l’invasion armée des autres territoires disponibles, les génocides de leurs peuples et la rapine de leurs matières premières. La propagande de l’oligarchie bourgeoise appela ces actions criminelles la « découverte » du « nouveau monde », où elle déclarait porter, déjà !, la « liberté », la « démocratie », et, avec elles, la « civilisation », qui comprenait la « révélation chrétienne ».

Ainsi, sont nées les « démocraties libérales ». Deux mots plutôt qu’un seul masquaient mieux la laideur du système exploiteur-dominateur, tout en l’enjolivant. En effet, la démocratie se partageait uniquement entre les castes formant l’oligarchie, par exemple les « républicains » et les « démocrates ». Tout autre parti qui se proposait de défendre la classe des exploiteurs était dénoncé, d’abord comme « athée », ensuite comme « anarchiste », « socialiste », « communiste ». Quand la stigmatisation verbale ne suffisait plus, la neutralisation s’opérait par la répression policière, puis armée, soit de manière camouflée (milice de gangsters) sinon ouverte (l’armé). Nous en sommes encore là.

Tentative avortées.

Le développement de la bourgeoisie capitaliste provoqua celui de la classe qu’elle exploitait pour s’enrichir : les travailleurs des manufactures.

À son tour, ceux-ci, à travers une élite intellectuelle à leur service, tenta d’imiter la bourgeoisie en s’organisant pour effectuer une autre sorte de révolution : « prolétarienne », pour éliminer le système capitaliste et le remplacer par un autre d’où seraient exclue toute forme d’exploitation économique, de domination politique et d’aliénation idéologique.

Hélas et beaucoup de fois hélas !… Comme dans les révolutions bourgeoises, notamment française, l’idée et la stratégie qui s’imposèrent ne furent pas celles d’un mouvement social qui s’auto-émancipait avec ses propres forces (position de l’anarchisme libertaire). Au contraire, ce mouvement social devait se soumettre à une « élite » qui s’auto-proclama « scientifique et unique révolutionnaire » (position marxiste). En ceci, la théorie de Marx, après des écrits de jeunesse certes libertaires, se révéla être, dans sa nature fondamentale, une vision bourgeoise parce que de caste élitaire et autoritaire. Et comme l’idéologie dominante de l’époque était ainsi caractérisée, le marxisme l’emporta sur l’anarchisme libertaire, avec les résultats que l’on sait. L’expérience concrète fut l’impitoyable et objective critique des prétentions marxistes, déjà dénoncées lors de leur apparition par ceux qui désiraient sincèrement « Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes ».

Le résultat du mouvement prolétarien fut dans son essence identique à celui de la révolution bourgeoise. Une caste nouvelle s’empara du pouvoir étatique, s’enrichit économiquement et domina idéologiquement. Avec la révolution française, cette oligarchie fut bourgeoise capitaliste ; avec la révolution russe, et celles qui l’imitèrent, cette oligarchie fut capitaliste étatique, et son aspect bourgeois fut masqué par une rhétorique « prolétarienne ». Voilà pourquoi les structures sociales fondamentales demeurèrent d’essence bourgeoise capitaliste, quoiqu’en disaient les leaders qui continuaient à oser l’imposture de se proclamer « prolétariens ».

« Démocratie populaire ».

Cependant, dans le naufrage du mouvement des peuples laborieux, cette expression est à noter. À première vue, « démocratie » et « populaire » semblent synonymes, des pléonasmes. En effet, demos-cratos signifie pouvoir du peuple ; dès lors, pourquoi ajouter l’adjectif « populaire » ?… Eh bien, pour distinguer la démocratie bourgeoise de celle populaire.

La démocratie bourgeoise reste fondamentalement semblable à la première forme de démocratie, celle athénienne : une minorité oligarchique se partage les pouvoirs étatique, économique et idéologique au détriment de la majorité de la population. Ajoutons-y l’impérialisme, ne l’oublions pas.

À la majorité de la population, constituée de travailleurs dans diverses professions, est concédé le droit de vote pour choisir quel... clan de la caste oligarchique détiendra le pouvoir, au nom de la Cité (Athènes) ou de la nation (époque moderne). Et les appareils idéologiques médiatiques de l’oligarchie bourgeoise sont là pour conditionner le peuple à opter pour le vote non seulement « utile » mais... « libre » !.. Là est l’immense succès machiavélique de la bourgeoisie capitaliste impérialiste : convaincre le peuple qu’il est totalement libre de choisir ses représentants. En effet, l’apparence y est, mais pas la nature essentielle du phénomène des élections. Il y a donc, en effet, une démocratie mais bourgeoise. Mais ses représentants n’emploient jamais l’adjectif, car il dénoncerait la nature sociale de cette démocratie, à savoir un système où une minorité oligarchique vit au détriment de la majorité de la population.

Par contre, dire « démocratie populaire », c’est préciser la caractéristique de cette démocratie : en l’occurrence, celle qui sert les intérêts du peuple. Et c’est bien là la forme de démocratie la plus complète, la plus authentique, la meilleure. En effet, ce type de démocratie implique : 1) la liberté, mais pas au détriment des autres, y compris dans le domaine économique ; s’il y a profit, il doit être au service de la communauté entière, et non pas uniquement d’une minorité oligarchique ; 2) ce genre de liberté authentique implique l’égalité entre tous les membres de la communauté humaine, et non pas uniquement entre les membres de l’oligarchie ; 3) ce type de liberté et d’égalité implique la solidarité entre tous, et non pas uniquement entre les membres des divers clans constituant l’oligarchie,.

Encore hélas et beaucoup de fois hélas !… Ce merveilleux concept de démocratie populaire fut récupéré, détourné, sali et avili par les castes marxistes ou marxisantes et leurs avatars « populistes » et « nationalistes » qui prirent le pouvoir dans certaines nations, dont l’Algérie… Au point que cette magnifique et juste expression, démocratie populaire, est devenue pratiquement inutilisable, inopérante, l’objet de sarcasmes à jute titre, car montrant une méprisable imposture. En effet, qu’y avait-il ou qu’y a-t-il de réellement démocratique et populaire dans les nations qui se déclaraient ou se déclarent telles ?

Voilà pourquoi les expériences prétendument « révolutionnaires », « pour » le peuple ont échoué, parce que rejetées par le peuple lui-même qui se rendait compte de la tromperie. Il finissait par constater que les soit disant « leaders », « guides », « sauveurs » populaires, et autres titres ronflants, étaient, en réalité, une forme inédite d’oligarchie. Même pire que celle de capitalisme privée, car elle était totalitaire : interdits les syndicats autonomes de travailleurs, interdite la liberté d’association et d’opinion, interdite et impitoyablement réprimée toute contestation de la part du peuple de cette monstrueuse oligarchie.

Voilà pourquoi actuellement, partout dans le monde, le peuple et les intellectuels qui s’en soucient peinent énormément à trouver les mots, les idées, les concepts pour indiquer un système social réellement juste à construire. Certains parlent d’ « État de droit », de « justice indépendance », de « droits humains », de « liberté », de « démocratie » (et même de « civilisation » !), sans autre précision. Cependant, celle-ci est donnée par les situations de plus en plus précaires des peuples, les enrichissements de plus en plus scandaleux de minorités oligarchiques, et les agressions de plus en plus criminelles contre l’humanité des divers impérialistes, néo-colonialistes et ce qui reste encore de colonialistes.

Mais combien notent que les mots « démocratie », « liberté », « État de droit », « justice indépendante », « droits de l’homme », etc., ne sont jamais accompagnés des termes « égalité » et « solidarité » ? C’est-à-dire ces deux termes qui donnent précisément aux autres mots leur définition et leur contenu les plus authentiques, les plus humains, parce que ces deux mots jamais prononcés, égalité et solidarité, englobent tous les êtres humains sans exception, donc élimine toute forme d’oligarchie, donc d’exploitation économique par l’intermédiaire d’une domination politique, légitimée par un conditionnement idéologique… Celui qui objecterait que ces réflexions sont « extrémistes », « trop radicales », etc., qu’est-il sinon un privilégié, d’une manière ou d’une autre, du système social qui réduit les peuples aux misères qui, elles, sont extrêmes et radicales ?

Quand donc finira le jeu de dupes (dupeurs et dupés) de ceux qui emploient le mot « démocratie » pour exploiter-dominer de façon machiavélique, ignominieusement criminelle, les peuples de la planète, pour arriver enfin à un emploi de ce terme de manière conforme aux intérêts de l’humanité entière ? (1)

_____

(1) Sur le thème de la démocratie, des approfondissements se trouvent ici : « LA GUERRE, POURQUOI ? LA PAIX, COMMENT... », « SECTION I.LES FACTEURS DE GUERRE / PARTIE II. POUVOIR ou qui commande au détriment de qui? Et pourquoi? », et « SECTION III. QUEL ORDRE ou qui tire profit du désordre? / PARTIE III. POUVOIR ». In https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-guerre-paix.html, librement télé-déchargeable.

 

Publié sur Algérie Patriotique, le 18 juin 2019, sur Le Matin d'Algérie, le 20 juin 2019, et sur La Tribune Diplomatique Internationale, le 19 juin 2019.

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Rédigé par Kadour Naimi

Publié dans #PEUPLE-DEMOCRATIE

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Publié le 10 Juillet 2019

Le dilemme de l’intifadha populaire

Dans mes écrits précédents, avant et pendant la présente intifadha populaire surgie le 22 février 2019, je soulignais l’importance stratégique de l’auto-organisation et de l’élection, sous mandat impératif, de représentants pour défendre les exigences légitimes populaires devant les détenteurs du pouvoir étatique. Après quatorze vendredis de manifestations publiques, je ne parvenais pas à comprendre la carence fatale de cette auto-organisation.

Peurs.

Des contacts et conversations avec des participants au mouvement populaire m’ont fourni un premier éclaircissement. Le voici, présenté en substance.

- Nous avons, m’a-t-on déclaré, une expérience extrêmement négative des organisations et des représentants, pour le motif suivant. Les organisations ont toujours été rapidement infiltrées par des éléments de la police politique, et les représentants qu’on avait choisis étaient assez facilement achetés par les gens du pouvoir. Dès lors, nous avons peur de commettre les mêmes erreurs.

- D’accord, je comprends très bien votre crainte. M ais, je suis également très conscient de ce que toutes les expériences de rupture sociale enseignent : sans auto-organisation et représentants adéquats, aucun mouvement populaire ne peut passer de la phase négative, - à savoir contester l’oligarchie dominante en place -, à la phase constructive d’un nouveau système social, correspondant aux exigences légitimes du peuple.

- Oui, admettent mes interlocuteurs, nous comprenons la nécessité de l’auto-organisation, néanmoins, nous avons peur de tomber dans le piège auparavant évoqué.

- Mais, concernant le problème de la récupération de vos représentants par l’oligarchie dominante, le mandat impératif est une très bonne garantie pour maintenir vos représentants dans le respect de leur mission. En effet, le mandat impératif a ces caractéristiques : vos représentants seront chargés uniquement de formuler aux gens du pouvoir vos exigences, puis de vous rapporter les réponses fournies, rien d’autre. Si, par hasard, vous constaterez que vos représentants ne remplissent pas convenablement leur mission, d’une manière ou d’une autre, volontairement ou non, eh bien, vous n’avez qu’à les changer.

- D’accord ! Mais comment éviter l’infiltration de notre auto-organisation par des éléments introduits par l’oligarchie dominante ?

- C’est vrai que c’est là un sérieux problème.… L’infiltration est une méthode normale de la guerre sociale que livre toute oligarchie aux organisations populaires.

- Comment l’éviter, alors ?

- Par la définition claire de vos objectifs, avec vote majoritaire. Une fois ces objectifs décidés, toute tentative de déviation, visiblement au service de l’oligarchie, vous permettra de démasquer son promoteur comme un agent infiltré.

- Cela exige le maximum de conscience et de vigilance de notre part.

- Exactement !

- Voilà le problème : nous manquons terriblement de formation politique, donc de conscience et de vigilance citoyennes. Même les syndicats autonomes de travailleurs rencontrent des difficultés : pas seulement la lutte entre chefs, dévorés les uns les autres par le « zaimisme », à savoir vouloir être le chef incontesté, de mentalité hiérarchique autoritaire, mais l’autre problème est l’infiltration par des agents de l’oligarchie, qui sèment la confusion, le doute et le désespoir parmi les membres du syndicat autonome. Pour affronter et éliminer ces risques certains, seule la formation et la conscience politiques les plus aiguës peuvent servir. Malheureusement, nous en manquons terriblement.

- Comment expliquer cette situation ?

- Durant ces vingt dernières années de boutéflikisme, tout a été fait pour annihiler la conscience sociale et politique, et le moyen le plus performant a été l’argent ! Celui du pétrole et du gaz. Avec l’argent, toutes les consciences ont été achetées, corrompues, asservies, celle des soit disant « élites » comme celle du peuple, les juteux salaires et privilèges pour les « élites », et les subventions sociales pour le peuple. Sans parler de l’obscurantisme religieux. Qui donc a multiplié la construction de mosquées ? L’État et les affairistes privés, dans les deux cas de manière mafieuse !… N’oublions pas, pour la toute petite minorité qui ne s’est pas vendue, par respect de sa propre dignité, la peur !… La peur de la répression, de perdre son travail, d’être emprisonné sous fausse accusation, de risquer de mourir dans une prison par manque de soins.

- Qu’en est-il, alors, de cette peur ?

- Elle n’a pas tout-à-fait disparu. Oui, il y a les manifestations de rues. Mais vas dans les quartiers, parles avec les gens de ce qu’ils pensent des événements, de la nécessité de faire dégager toute la issaba [oligarchie] qui est restée, après la démission honteuse de Bouteflika, et tu constateras que la peur est encore là d’avoir des ennuis en exprimant son opinion sur cette issaba encore en place. À ce sujet, j’ajoute ceci : il est possible que ceux qui pourraient être nos représentants n’ont pas suffisamment confiance dans les autorités étatiques pour se montrer et agir, de peur qu’il leur arrive quelque chose de trop regrettable.

- Il reste, alors, d’une part, à récupérer le temps perdu en ce qui concerne la conscientisation sociale et politique, et, d’autre part, d’arriver au courage et à la sécurité d’élire des représentants malgré le risque dont tu parles.

- Ah ! Le temps et la sécurité !… Comment réaliser en quelques jours ce qui a été détruit durant des décennies, depuis l’indépendance nationale ?

- Eh bien, il n’y pas de choix : il faut commencer le plus vite possible. Par exemple, en dehors des manifestations populaires du vendredi, à auto-organiser des forums de discussion. Ils commencent à apparaître. Mais pas seulement en un seule point de la ville, par exemple au centre, mais dans tous les quartiers, systématiquement. Là est la véritable force du mouvement populaire. Car il est plutôt facile de neutraliser un forum unique dans le centre-ville, mais beaucoup plus difficile de neutraliser des dizaines, éparpillés dans le plus de quartiers possible.

- Nous sommes conscients, ou, plutôt, nous commençons à prendre conscience de cette nécessité, mais nous ne sommes pas assez nombreux pour réaliser un tel projet, qui est, évidemment, indispensable.

- À propos de nombre, combien sont les membres de ce qu’on appelle l’ « élite » qui sont avec vous, sur le terrain, combien de militants de partis politiques, d’universitaires, d’étudiants, d’intellectuels ?

- Oh, hélas ! Pas bezzaf ! Pas bezzaf ! Trop peu !

Hypothèse explicative.

Voilà où en est le magnifique soulèvement populaire en Algérie, surgie voici quatorze vendredis. Et là est le dilemme : être ou ne pas être un mouvement populaire, autrement dit un mouvement capable, après avoir manifesté publiquement et magnifiquement sa présence dans les rues, capable de s’auto-organiser comme institution de contre-pouvoir afin de devenir le pouvoir authentique du peuple démocratique. Même le chef d’État-major a exprimé le souhait de voir le mouvement populaire se doter de représentants pour dialoguer avec eux (1).

Alors ?… Alors, peut-être que l’explication de cette carence, au-delà des motifs évoqués plus haut, réside plus profondément : dans le manque historique de capacité auto-organisatrice du peuple et de ses « élites ».

À l’exception de la période d’autogestion, surgie juste après l’indépendance, et l’expérience des comités de village durant le mouvement citoyen de 2001, le peuple algérien n’a connu que : 1) le zaimisme, à commencer par Messali Hadj, jusqu’à aujourd’hui ; 2) le caporalisme, tant celui du pouvoir étatique que d’un parti majoritaire de l’opposition passée : le PAGS ; 3) une « élite » politico-intellectuelle qui n’a jamais cru aux possibilités créatrices auto-organisationnelles du peuple. Aujourd’hui encore, après quatorze vendredis de manifestations populaires, extrêmement rares sont les voix qui appellent et/ou contribuent à l’auto-organisation du peuple ; la majorité des voix dites « autorisées » et « éminentes », s’auto-proclament les « sauveurs » de ce peuple, tout en lui dressant, verbalement, les plus beaux lauriers, à l’exception, bien entendu, du meilleur des lauriers : celui d’être capable de s’auto-organiser.

C’est à contribuer à cette capacité que se reconnaissent les amis et amies vraiment sincères du peuple (2), car le problème fondamental est celui non pas de se servir du peuple, pour faire carrière, mais de servir le peuple pour construire une société libre, égalitaire et solidaire, caractéristiques de la meilleure des démocraties (3).

Il reste donc à contribuer au surgissement de cette conscience citoyenne, levier stratégique pour permettre au mouvement populaire de passer de la phase contestataire à celle auto-institutionnelle.

Ceci étant dit, tout mouvement populaire dans le monde, de tout temps, a toujours souffert de carence en matière d’auto-organisation et de solidarité des « élites » politiques et intellectuelles, même dans le cas le plus exemplaire, celui espagnol (3). En 1936, lors du surgissement des « colectividad » (collectivités, équivalents à des comités d’autogestion), l’esprit auto-organisationnel y avait une histoire riche, plus que séculaire, commencée déjà dans les années 1860, grâce à l’influence d’un homme de réflexion théorique et d’action sur le terrain, nommé Michel Bakounine. Ce qu’il appelait « anarchie », rappelons-le, c’était, en fait, la destruction de ce qui était le désordre social le plus barbare, pour instituer le seul authentique ordre social, celui du règne de la liberté, de l’égalité et de la solidarité humaines.

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(1) Dans une contribution suivante, ce problème sera exposé au vu d’une récente déclaration.

(2) Voir http://kadour-naimi.over-blog.com/preview/37130cfcfcbd9b559baa8fe1b071ff3a1e0a21dd

(3) Une prochaine contribution examinera le thème de la démocratie.

(3) Voir http://kadour-naimi.over-blog.com/search/comment%20une%20r%C3%A9volution%20devrait%20%C3%AAtre%20faite/

 

Publié sur Algérie Patriotique, le 01 juin 2019, et sur Le Matin d'Algérie, le 28 mai 2019.

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Rédigé par Kadour Naimi

Publié dans #PEUPLE-DEMOCRATIE

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Publié le 9 Juillet 2019

« Hirak » ou « intifadha » ?

Pour désigner le mouvement populaire algérien de 2019, voici la motivation de la préférence pour le mot « intifadha ».

Le terme arabe « hirak » fut employé au Yémen en 2007 pour désigner un mouvement politique et armé, puis au Maroc pour indiquer le mouvement populaire pacifique du Rif depuis 2016. « Hirak » signifie littéralement « mouvement » , un terme trop vague, trop neutre, « chewing-gum », passe-partout.

Par contre, le mot « intifadha » se traduit exactement par « soulèvement ». En outre, il contient l’idée de « secousse salutaire » ; en arabe classique, comme dans le langage populaire algérien, le verbe « anfadh » se dit « secouer » ; on dit, « anfadh rouhak ! » (secoues-toi !), par exemple « de ta léthargie »), ou, encore, «anfadh kassoutak » (secoue tes vêtements) pour en supprimer les saletés, les rendre propres. Ce qu’on appelle le mouvement populaire algérien de 2019 est, de fait, un « soulèvement » contre une oligarchie trop prédatrice, afin de se « secouer » de sa léthargie, de se débarrasser des saletés sociales dont il est victime, pour retrouver sa propreté (sa dignité).

Il est vrai que le terme « intifadha » rappelle une lutte exemplaire d’un peuple pour sa dignité, celle du peuple palestinien contre une oligarchie coloniale. Bien entendu, ce combat est pacifique et armé.

Toutefois, il n’en demeure pas moins que le terme « intifadha », répétons-le, signifie « soulèvement », « secousse salutaire ». Alors, est-il légitime de rejeter ce mot parce qu’il rappelle la résistance palestinienne à l’occupation israélienne ?

Il est également à noter que les officines de propagande impérialo-sionistes n’aiment pas le terme « intifadha », parce qu’il évoque, précisément, le colonialisme dont est victime le peuple palestinien. Dès lors, ces mêmes officines trouvent convenable le mot « hirak ». Après tout, il ne signifie rien d’autre, comme déjà précisé, que « mouvement », un terme « politcally correct », très convenable à la propagande idéologique impérialo-sioniste. Dites par exemple à un membre du peuple, « hirak » puis « intifadha » ; vous constaterez que le second terme le fera sursauter et attirera son attention davantage que le premier terme.

Ne l’oublions jamais : les mots ne sont jamais innocents ! Ce sont des armes, de combat émancipateur ou d’aliénation dominatrice. Attention à leur utilisation adéquate, pour éclairer ce combat émancipateur, et non pas faire le jeu, par manque de vigilance, du langage de la propagande oligarchique, aliénante dominatrice. Et méfiance de ceux qui accuseraient cette vigilance d’excès, de trop mettre les points sur les i. C’est de cette précaution linguistique que dépend la désaliénation mentale, donc le résultat concret du combat pour l’émancipation libératrice.

Dès lors, « intifadha » n’exprime-t-il pas au mieux, le plus fidèlement possible l’équivalent « soulèvement », à savoir l’action contestataire citoyenne actuelle du peuple algérien, comme de tout peuple luttant pour sa liberté, d’une manière pacifique et/ou armée ?

S’agissant des compatriotes amazighes, si leur préférence va à un terme tamazight, qu’ils l’utilisent, équivalent à « soulèvement ». C’est là un enrichissement lexical.

Ceux qui décrivent cette intifadha algérienne actuelle comme « thaoura » (révolution) utilisent le mot de manière abusive. En effet, ce mot indique un changement radical abolissant un système socio-politique au bénéfice d’un autre. Nous n’en sommes pas à ce stade en Algérie, de manière concrète, bien que les manifestants appellent à ce genre de changement. Ce n’est qu’à l’avènement dans les faits de ce dernier, qu’alors il s’agira de « thaoura » (révolution).

Quant au mot « insurrection », en arabe on trouve « تمرد » (« tamarroud », évoquant une « maladie ») et « عصيان » (« 3oussyâne », soit « entêtement », « désobéissance »). Ce sont là deux termes qui ridiculisent la noblesse de ce qu’est une insurrection, donc qui ne peuvent émaner que d’une oligarchie. J’ignore si la langue arabe a un réel équivalent du terme « insurrection » ; pourtant, ce type d’acion eut lieu plusieurs fois dans les pays pratiquant l’idiome arabe.

En passant, notons l’étrange facilité avec laquelle le mot « hirak » est adopté par des manifestants (pas tous), et employé par la majorité des médias dominants oligarchiques, locaux et étrangers (et même certains alternatifs), ainsi que par des « personnalités » de l’ « élite » de la « société civile ».

Notons également l’étrange succès d’une chanson telle que celle intitulée « Liberté ». La désolante superficialité du contenu et le recours à une langue française, en outre médiocre, conviennent, bien entendu, à toute personne de conscience politico-sociale également superficielle et encore néo-colonisée linguistiquement, même dans ses chansons prétendument « populaires ». Le peuple algérien, quoiqu’on dise, d’abord, préfère exprimer ses revendications et chants dans ses langues maternelles (arabe algérien et tamazight), et, ensuite, a une conception de la liberté qui ne consiste pas seulement à ne pas en avoir « peur », mais à la concrétiser comme revendication fondamentale lui permettant de jouir de ses droits légitimes.

Certains objecteront que c’est là des considérations d’un aigri qui a constaté que le chant qu’il a proposé est resté ignoré (1). Il est vrai que la « marchandise-spectacle », faussement contestataire, plus exactement cette sorte de contestation qui conforte les oligarchies dominantes, est ce que préfère et alimente leur système idéologique, partout dans le monde. Hélas ! Quand un chant comme « L’Internationale » sera de nouveau composé et chanté par les peuples en lutte pour leur émancipation ? Ce chant, écrit par un authentique ouvrier cordonnier, membre de l’inoubliable Commune de Paris de 1981, fut malheureusement récupéré et sali par des oligarchies prétendument « prolétariennes ». Pourtant, il proclamait : « Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes / Du passé, faisons table rase / Décrétons le salut commun ». Et quand l’intifadha algérienne actuelle produira un chant à la hauteur de notre très beau « Min jibâlinâ » du temps de la guerre de libération nationale ?

Revenons à « intifadha ». Voici une explication sur sa transcription en lettres latines. Le « h » suivant le « d » consiste à ne pas faire du suivisme néo-colonial occidental, qui écrit le mot « intifada » sans le « h ». Insérer cette lettre, c’est respecter fidèlement le terme original. En celui-ci, la lettre arabe n’est pas le « d » (د) mais une lettre plus compacte (ض). Les Occidentaux n’ont aucune difficulté à la prononcer, car elle est proche du « th » anglais. D’où le « d » suivi du « h ». Est-là du purisme ?… C’est simplement veiller au respect de la translitération d’une langue, et, ainsi, s’agissant d’une langue d’un peuple anciennement colonisé, à nous émanciper du néo-colonialisme de manière radicale, ce qui implique le domaine linguistique, pour faire partie dignement de la communauté humaine mondiale (2).

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(1) Voir http://kadour-naimi.over-blog.com/preview/0fbe2a2065ef1fe4d15cfe9627a8c18736f54bac

(2) Le problème linguistique est développé dans mon essai « DÉFENSE DES LANGUES POPULAIRES : le cas algérien », librement disponible ici : https://www.editionselectronslibres-edizionielettroniliberi-maddah.com/ell-francais-sociologie-oeuvres-defense_langues_populaires.html

 

Publié sur Algérie Patriotique, le 10 juin 2019, et sur Le Matin d'Algérie, le 09 juin 2019.

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Rédigé par Kadour Naimi

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